Je pars en excursion.
Cette curieuse expérience d'avoir planté des conifères dans des bacs en béton fait le caractère particulier de la rue Duluth. Et on y ajoute chaque été de la décoration: que ferions-nous sans les éternelles impatientes... Je passe par ici à tous les jours et c'est maintenant que les patates douces (Ipomoea batatas, Sweet potato) atteignent tout juste leur débordement, et révèlent leur luxuriante tropicalité. À la toute fin de la saison... à temps pour les ranger, quoi! Une alternative (je le répète): mettez-y des Vignes du rivage! (Vitis riparia, River Bank Grape). C'est une espèce vivace, résistant à tout et produisant des petits raisins... Côté luxuriance, elle n'a rien à envier à la patate, aussi douce soit cette dernière... La Vigne des rivages est indigène, vivace, non-gélive et utile aux oiseaux. On ferait des économies en plus...
Avançons...
Note: Faut pas que j'oublie d'aller inspecter cette ruelle "verte", volontairement verdie avec effort citoyen et dépense. Qu'en reste-il? La flore spontanée semble avoir remplacé les herbacées qu'on y avait planté. Sans soins assidus c'est inutile.
Coin avenue du Parc. On le plante en masse: le Chêne à gros fruits (Quercus macrocarpa, Bur oak). Espèce magnifique, naturellement présente dans la région, adaptable à tous les sols et supportant l'environnement urbain. Étonnant de voir ces jeunes sujets (plantés il y a un an ou deux sur l'avenue des Pins) qui produisent déjà des glands. Ils sont les plus gros (cela a peut-être inspiré le nom de l'arbre?) et sont très reconnaissables à la frange qui borde la cupule portant le gland.
Explorant les coins et recoins urbains, j'aperçois au loin la belle cime ci-haut (hum... cime ci-haut... est-ce assez euphonique?). Quel est ce grand arbre?
Surprise! C'est un très beau Chicot févier (Gymnocladus dioicus, Kentucky coffeetree) au long fût, un peu inhabituel. L'arbre porte des branches basses normalement. Celui-ci non et il fait au-delà de vingt mètres, ce qui est pas mal du tout pour l'espèce.
Je vous le montre de deux points de vue, également élégant sous toutes les coutures. Quel gracieux feuillage. Les feuilles de l'arbre sont énormes: elles font jusqu'à 60 x 90 cm. Je crois bien en avoir prise une qui faisait un peu plus...
La voici cette feuille géante. Il n'y a qu'un seul point d'attache du pétiole sur la branche: ceci est bien une seule feuille. On dit: feuille doublement composée ou composée-bipennée. À partir du pétiole central, des rachis portent des folioles sur des pétiolules. C'est évident! La feuille ci-haut fait 90 cm justement. Pas facile à photographier! Feuille au plancher, moi perché dans l'escabeau...
Toutes ces déambulations, pourquoi donc?
Je venais revisiter le réservoir McTavish sous l'actuel Parc Rutherford. La façade rocheuse ci-haut résulte de la coupe du piémont pour creuser le réservoir vers 1850. Vers 1950 on recouvre le réservoir et ça nous a donné ce parc. On y fait actuellement des travaux et on a "régularisé" la "falaise". Bien des arbres y sont passés… Ceux qui restent ont les racines exposées... Disons qu'on en a pas pris grands soins. Il y avait ici entre autres des sorbiers (Sorbus americana, Sorbier d'Amérique) perchés sur le roc. Very romantic. Disparus! Dommage, ces derniers étaient trop bien à leur place. Le nom anglais de cet arbre est Mountain ash, cela lui rend très bien justice.
Coincés entre le sommet de la falaise et l'avenue des Pins derrière, ces arbres forment un boisé linéaire. C'est une haie urbaine selon ma propre définition. En milieu anthropique sa diversité est d'origine complexe, avec quelques aspects intéressants. Tout d'abord le lien avec la montagne est évident. Certaines de ses espèces fruitières ont probablement migré ici.
Mais il y a aussi d'autres fruits...
Malgré le ciel couvert et les nuages menaçant derrière la montagne, il faisait très chaud, je n'étais sorti que pour une heure, une heure et demi croyais-je, je n'avais pas apporté d'eau. Je suis sur la route depuis plus de deux heures maintenant. Alors la soif. La soif et un petit creux.
Justement, les haies ont habituellement des pommiers, peut-être est-ce même un élément nécessaire, constitutif... Je suis déjà venu, je savais qu'il y en avait ici. Des pommes? J'en ai trouvé, juteuses et délicieuses en plus! Tout va mieux.
En campagne, comme en ville, le long du chemin (ou du trottoir...), le promeneur croque sa pomme puis sème ainsi le coeur de la haie...
Merci au promeneur qui m'a précédé!