mercredi 12 mai 2010

Plantation Autocad, géométrie de l’ennui



L’an passé on a coupé tout un groupe de pommetiers (et des ormes et des tilleuls) à la place Alfred-Duquesne à Montréal pour faire place à cette nouvelle piazzetta. La construction du Quartier des Spectacles nous privait ainsi d’un spectacle printannier tout rose, incontournable depuis des décennies. Il y avait eu pas mal de protestations. L’aménagement qui s’achève maintenant mérite à nouveau notre attention. On a bien replanté comme promis des pommetiers et ils sont même en fleurs.  Par contre nous n'avons pas encore assimilé l'idée que les arbres, surtout de beaux arbres à fleurs, sont bien plus que du mobilier urbain ou un prétexte aux extravagances des redessinateurs en plan et élévation.





Un bien curieux design ces fosses d’arbres: on avait le choix de la surface et du volume de la fosse puisqu’on refaisait tout en neuf. On a opté pour des fosses aux dimensions assez médiocres. On nous avait pourtant promis des fosses plus grandes... Peut-être le seul aspect positif (à moins que ce ne soit qu’un accident...) les pierrres dans le sol sont un excellent moyen (largement expérimenté ailleurs) d’empêcher la compaction du sol sur les racines. Mais il y aura une grille... Mais...




... pourquoi n’a-t-on pas tout simplement planté ces arbres en pleine terre tout à côté!? On aurait aussi pu réduire la surface pavée qui n’est après tout qu’une minéralisation supplémentaire au centre-ville. Hélas, on a besoin d’espaces de festivals avec le moins d’ombre possible, les humains n’étant jamais assez bronzés! Et la solution c’est la procédure Autocad... des arbres bien droit, un seul par trou, planté dans une surface idéale et artificielle: une joyeuse plage bétonnée, faite pour donner soif... (vous croyez qu’on pensera à des abreuvoirs... rêvons un peu!) Les grands espaces vides, c’est pour la circulation des humains m’expliquent-on inmanquablement comme si quelque chose échappait à l’observateur... les humains requièrent du dur et du sûr pour se faire bronzer. (et s'acheter des consommations...). Je veux bien, mais les arbres, eux?



Les fausses-fosses ont une surface à 50% de béton. Il doit y avoir des grilles signatures bien intéressantes (valant bien plus cher que les arbres) qui seront installées. Des fosses inutiles recouvertes de grilles inutiles: on avait après tout qu’à planter  les arbres à côté... C'est un aménagement dessiné dans un bureau aseptisé: le logiciel propose tant d’arbres par tant de mètres carrés. Une autre option du logiciel: “je dois planter quinze pommetiers, arrange-moi ça” et le logiciel répartit uniformément la verdure verticale sur la longueur bétonnée. Curieusement, en fait, un aménagement avec un souci premier de la santé et du respect des arbres et de leurs services (beauté, fraicheur, parfum...) aurait été source d’économie. La parcimonie du vivant échappe totalement à nos architectes. L’espace du monde vert doit être un peu plus qu’un résidu budgétaire. On y arrivera peut-être un jour... Je ne toucherai pas la question de la biodiversité, vous comprendrez... ce n'est pas la place!

Pour corriger (avec ennui) le slogan du Quartier des Spectacles: “C’est petit, mais c’est tellement petit...”


7 commentaires:

  1. Je suis entièrement d'accord avec vos propos.

    Les gens aiment le propre à ce qui paraît, le bien ordonné, structuré, sans rien qui retrousse ou qui ne soit pas à sa place, bien rangé.

    On ramasse les feuilles mortes, les débrits de végétaux mais on jette par terre le papier, les contenants, etc. C'est le monde à l'envers!

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  2. Pour votre information, ces fosses d'arbres sont remplies de terres structurantes et connectées au plan vert situé juste au nord. Les racines pourront donc croître à leur guise.

    J'ajouterais aussi que le projet du Quartier des spectacles ajoute plus de 400 arbres autour de la Place des arts, un exploit considérant les contraintes imposées par la tenue de grands événements.

    Finalement, sachez que l'espacemenet de 6 mètres entre les fosses d'arbres qui est pratiqué dans le QDS est un des plus serrés à Montréal. D'ailleurs, vous n'avez qu'à aller dans le Quartier international pour voir que le bureau d'architecte auquel vous faites référence est en fait très sensible au vivant et que les fosses de plantation continues remplie de terre non-compactée (qui seront utilisées sur la rue Ste-Catherine) donnent de très bons résultats.

    Vous soulevez d'importantes questions, mais il serait bon que vous vous informiez auprès des concepteurs avant de porter de tels jugements.

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  3. En réponse à Joël, point par point:

    "Pour votre information, ces fosses d'arbres sont remplies de terres structurantes et connectées au plan vert situé juste au nord. Les racines pourront donc croître à leur guise."

    Terre structurante? Oui, c’est bien ce que je dis. Quant à la connexion avec le plan vert, outre que cela me semble une entourloupette, ce n’aurait pas été plus simple d’y planter justement les arbres? Questions de langage et de point de vue: par plan vert voulez-vous signifier la surface gazonnée? Après le façadisme le surfacisme?

    "J'ajouterais aussi que le projet du Quartier des spectacles ajoute plus de 400 arbres autour de la Place des arts, un exploit considérant les contraintes imposées par la tenue de grands événements."

    Je sympathise avec les architectes vu les contraintes. Mais l’endroit reste un four à convection! Mon propos vise en tant que généralité les aménagements qui font la place congrue (dans ce cas-ci incongrue...) aux arbres et à leur utilité (de l’ombre!). Si on avait planté les arbres en pleine terre plutôt que dans ces fosses coûteuses on aurait pu en planter trois fois plus pour le même coût. Je suis radin.

    "Finalement, sachez que l'espacemenet de 6 mètres entre les fosses d'arbres qui est pratiqué dans le QDS est un des plus serrés à Montréal. D'ailleurs, vous n'avez qu'à aller dans le Quartier international pour voir que le bureau d'architecte auquel vous faites référence est en fait très sensible au vivant et que les fosses de plantation continues remplie de terre non-compactée (qui seront utilisées sur la rue Ste-Catherine) donnent de très bons résultats."

    L’espace vert qui était là est néanmoins sévèrement réduit! Malgré votre suggestion je vais pas aller voir ailleurs (au Quartier International) pour juger ce qui a été fait ici! L’espacement de 6m, même s’il est “un des plus serrés à Montréal”, est justement le problème et constitue le propos de mon billet: on applique les normes et aucune innovation n’est envisagée. C’est ma métaphore AutoCAD. Un élément simplissime comme un abreuvoir n’a même pas été pensé! Pas prévu dans le logiciel (métaphore...)? L’endroit n’est pas plus convivial pour les humains que les arbres, voilà!

    "Vous soulevez d'importantes questions, mais il serait bon que vous vous informiez auprès des concepteurs avant de porter de tels jugements."

    Les arbres sont peut-être plus que cette ponctuation rythmique conforme aux 6m qui est habituellement proposé. Désolé pour mon jugement limité: il s’est fait sur place en constatant ce que j’observais, avec le peu qu’on me donnait à voir. C’est la seule information dont j’ai besoin!

    Merci tout de même de vos commentaires, salutations!

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  4. Pourtant vous devriez aller vous promener sur St-Antoine dans le Quartier international quelques heures après une averse par une chaude journée d'été, parce que c'est ce à quoi ressemblera le Quartier des spectacles dans quelques années. Vous constaterez que le trottoir reste moite, parce que justement les trottoirs sont à l'ombre.

    Par ailleurs, le ton méprisant que vous employez n'avance en rien la discussion. J'aimerais bien savoir quel type d'aménagement vous auriez proposé pour accueillir des centaines de milliers de personnes (être humains qui se rendaient allègrement dans le Quartier des spectacles pendant la saison des festivals alors même qu'il n'y avait aucune verdure, je vous ferais remarquer).

    Il est facile de se complaire dans la critique verbeuse de ce qu'ont fait les autres, il est beaucoup plus difficile de faire et de travailler avec les contraintes réelles du monde réel.

    J'attends vos propositions.

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  5. Ma réponse est en deux versions, l’une brève et l’autre verbeuse:

    La brève: trop de minéral, pas assez de végétal!

    Et la verbeuse:


    Le ton ne passe pas toujours très bien dans le billet d’un blog. Ni dans un commentaire: ainsi je pourrais croire que vous m’envoyez promener! Je veux bien retourner au Quartier international. Ce n’est toutefois pas le propos.

    Je ne crois pas être méprisant. Le petit parc qui était là, avec les pommetiers, est bien disparu. La belle côte verte garnie d’arbres sur Jeanne Mance aussi. On aurait pas pu faire avec? Je ne vise personne directement mais les façons de faire en général. Je fais une critique de la considération “accessoire” et minimaliste de la verdure. Et surtout de la festivalite montréalaise...

    Ne soyez pas condescendant avec moi: je fais et travaille (ici et ailleurs) à tous les jours avec les contraintes réelles du monde réel... comme tout le monde.

    Les contraintes de la commande QDS étaient nombreuses sans doute. Je crains que la maximalisation de l’espace nu et minéral ne soit pas dans l’intérêt de la santé publique. De plus, comme vous le savez, on fouillera les gens à l’entrée de cet espace périodiquement privatisé. On pourra même en interdire l’accès. Contraintes et contrôle... Qui est méprisant? Alors ne prenez pas cela personnel, comme on dit!

    J’aime pas les grandes places à foules festivalisées, ça me rappelle le stade de Nuremberg... vide ou plein, c’est pas joli. En passant la promenade verte du Luitpoldhain avait été remplacée par le stade Luitpoldarena à Nuremberg. La festivalite minéralisée n’a vraiment rien pour me réjouir! Mais je doute que beaucoup me suivent dans cette analyse... Alors festivalons!


    Mes propositions: j’attends de l’ombre et de l’eau, le bétail mérite bien cela.

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  6. Voilà un billet très intéressant et une conversation des plus animées!
    La seule chose que j'ai à dire (un peu sur le tard) c'est que pour avoir étudié au Complexe des sciences qui est à proximité, j'ai souvent marché dans ce petit parc. Il était bien plus garni d'arbres et c'est ce qu'on aimait de l'endroit! Je suis tout à fait d'accord que les arbres auraient dû être plantés dans la pelouse (ça déjà été prouvé maintes fois que leur croissance s'en retrouve améliorée). Bon, les pommiers, ils sont beaux, mais on aurait pu créer des îlots d'arbres différents également. Bref, ce qu'on ressent à regarder cet aménagement,c'est qu'il n'y a pas eu d'imagination, on n'a pas cherché à étonner, à maximiser cet espace vert en lui donnant une âme...
    C'est ce que je trouve de plus malheureux...

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  7. Voilà Jasmine! Ça prend une horticultrice pour avoir cette sensibilité de planter les arbres au bon endroit. Plus simple, plus économique et plus sain! Moins "design" pour certains...

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